Les normales de saison sont-elles vraiment… normales ?

On entend souvent parler de "normales de saison" en regardant la météo : elles donnent une température ou un niveau de pluie de référence sur une période donnée de l'année. Mais ces normales sont-elles toujours pertinentes ?

Qu'est-ce qu'une normale de saison ?

Lorsque le présentateur météo parle des températures du jour comme étant "au-dessus" ou "en-dessous" des normales de saison, il ne s'agit pas d'une estimation approximative. Ces normales sont calculées de manière rigoureuse et universelle, imposées par l'Organisation Météorologique Mondiale à ses pays membres.

Les normales de saison correspondent à la moyenne des températures quotidiennes enregistrées dans les stations météorologiques du territoire français. Ces données sont agrégées pour déterminer une température de référence à un endroit spécifique (pour calculer la moyenne nationale, Météo-France utilise les températures de 30 stations).

Pour définir une normale de saison, Météo-France calcule la moyenne des températures sur une période de 30 ans afin d'obtenir "un échantillon long et représentatif pour bien cerner le climat local", explique le climatologue Matthieu Sorel. Ce choix permet de contextualiser les événements exceptionnels tels que les vagues de chaleur ou de froid qui engendrent d'importantes variations de température. Le référentiel est actualisé tous les 10 ans. L'année dernière, le passage s'est fait de la période 1981-2010 à celle de 1991-2020.

Ainsi, comparer la température actuelle aux normales de saison revient à comparer le climat de 2023 à celui de 2005. En 2032, on passera aux normales de saison de la période 2001-2030.

Ce changement de référentiel fait aussi partie des recommandations de l'Organisation Météorologique Mondiale, afin de tenir compte de l'évolution du climat. Étant donné que le climat se réchauffe globalement, y compris en France où les températures moyennes augmentent au fil des ans, rester sur la période de référence 1981-2010 équivaudrait à comparer le temps de 2023 à celui de 1995. Or la température annuelle moyenne de la période 1991-2020 est plus élevée de 0,42°C par rapport à celle de la période 1981-2010.

Ces normales ne se limitent pas uniquement aux températures, elles sont également établies pour de nombreux autres paramètres météorologiques, comme la neige et le vent.

Pourquoi les normales de saison ne définissent-elles pas ce qui est "normal" ?

Lorsqu'on compare une température aux normales de saison, on la confronte à la moyenne des 30 dernières années, mais pas à une situation de normalité, c'est-à-dire "l'époque où il n'y avait pas de changement climatique".

"Le terme 'normale' est un peu inadapté, admet Matthieu Sorel. Il sous-entend une certaine normalité. Il faudrait plutôt le remplacer par 'référence' ou 'moyenne'."

Depuis 1970, chaque décennie est plus chaude que la précédente. Chaque nouvelle "normale" suit cette tendance. Ainsi, bien que les températures augmentent, le fait de les comparer à des valeurs de référence en augmentation réduit l'écart et minimise l'impact du réchauffement climatique.

Comment mieux représenter l'impact du changement climatique sur la météo ?

Pour éviter ce biais, d'autres références peuvent être utilisées pour contextualiser les températures. L'Organisation Météorologique Mondiale recommande initialement d'utiliser la période de référence 1961-1990 pour démontrer l'impact du changement climatique sur les températures.

"Nous pourrions également utiliser la notion de 'record'", propose Matthieu Sorel. Par exemple, comparer la température au record mensuel ou absolu permettrait de déterminer si elle est simplement au-dessus/en-dessous des normales ou vraiment exceptionnellement élevée/basse pour la saison. France Info a également développé un outil pratique et gratuit sur son site, offrant de nombreuses informations sur la météo du jour : température moyenne en France, variations par rapport à la période de référence 1971-2000, données spécifiques sur les villes, etc.

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